L’inspiration peut se trouver partout et sous n’importe quelle forme. Jusqu’à présent, j’ai écrit sur des personnes ayant vécu plusieurs décennies sur cette terre et qui nous motivent par leur détermination et leur énergie. Mais aujourd’hui, mon héroïne a l’âge de ma fille. En fait, elle était même dans la même classe que ma fille à la maternelle. Je n’ai pas vu le moment où elle est devenue la formidable athlète qu’elle est en train de devenir. Le temps m’a joué des tours, tout comme lorsque je réalise que mes propres filles sont maintenant adultes.
Voici Kayla Houari, 18 ans, aujourd’hui athlète de lancer du poids et espoir belge dans le monde de l’athlétisme. Tout a commencé lorsque Kayla avait 9 ans. Elle a participé à une course et a tellement aimé les sensations qu’elle a ressenties qu’elle a voulu se lancer immédiatement dans l’athlétisme. L’équipe locale d’athlétisme de Forest, un quartier de
Bruxelles, organisait une compétition ouverte. Elle a couru le 1000 m et le 60 m. Kayla a adoré être avec les autres enfants participants, et c’est ce qui l’a accrochée. Elle faisait déjà de la natation et de la gymnastique, mais elle préférait cette atmosphère de groupe qu’elle retrouvait sur le terrain. Elle a donc demandé à ses parents de l’inscrire dans un club.
En Belgique, les jeunes athlètes commencent toujours par pratiquer toutes les disciplines ; on ne peut pas en choisir une seule au départ. Dans son club, elle a eu un entraîneur formidable, Gilbert, qui repérait les enfants ayant un grand potentiel global. Il a formé un petit groupe de quatre filles qu’il estimait prometteuses. Elles montaient souvent sur le podium et étaient généralement très fortes. Elles se donnaient à fond, et il portait donc une attention particulière à ce groupe de jeunes athlètes en devenir. Ensemble, elles formaient une équipe de relais et participaient à différentes compétitions nationales, notamment au célèbre Challenge Éric de Meu, une étape emblématique pour tout jeune athlète. Ce challenge comprend cinq disciplines – javelot, lancer du poids, course de 60 m, saut en hauteur et 1000 m – un peu comme un pentathlon, avec un système de points. Le participant qui cumule le plus de points remporte le challenge. Kayla s’y est retrouvée parmi les meilleures de Belgique et montait presque toujours sur le podium dans sa catégorie d’âge.
Vers 12-13 ans, les quatre filles participaient encore ensemble. Elles faisaient de la natation, des haies, de l’heptathlon et du sprint. En heptathlon, il faut s’entraîner pour sept disciplines différentes. En général, on en pratique une par jour, ce qui signifie sept jours d’entraînement. Ce type de préparation est difficile à concilier avec un emploi du temps scolaire et d’autres activités. Kayla a continué ainsi pendant près d’un an, puis a décidé de se concentrer sur quelques disciplines afin d’y consacrer plus de temps et de perfectionner sa technique.
C’est à cette période que Kayla et sa famille ont quitté Bruxelles pour s’installer à Tubize, en Wallonie. Elle a rejoint le Club d’athlétisme de Nivelles, où elle a commencé par l’heptathlon avant de se spécialiser dans le lancer du poids et les haies.
Ces deux disciplines demandent à la fois une grande puissance explosive et une technique
précise. Elle s’entraînait alors quatre fois par semaine, deux fois pour chaque discipline. À cette époque, Kayla excellait dans les haies et se débrouillait plutôt bien au lancer du poids. Pendant un an, elle a continué à s’entraîner et à participer à de nombreuses compétitions. L’entraînement comprenait des exercices de force et de préparation physique (sauts, vitesse, etc.). Finalement, elle a choisi le lancer du poids comme discipline principale, car elle avait du
mal à maintenir le poids idéal pour les haies, une épreuve qui demande beaucoup de légèreté
et d’agilité. Une fois sa décision prise, elle a trouvé un entraîneur disponible pour deux séances d’entraînement par semaine. Elle a suivi ce rythme pendant environ deux ans. Elle a progressé rapidement, complétant ses séances par de la course et de la musculation. À ce stade, elle occupait la 4e place du classement belge.
White Star -Woluwe - 14ans |
En janvier 2025, Kayla envisageait de partir aux États-Unis grâce à une bourse sportive, en espérant que ses résultats en athlétisme viendraient renforcer ses bons résultats scolaires.
Cependant, avec seulement deux entraînements hebdomadaires, il était difficile de progresser davantage. Le destin a voulu qu’elle rencontre son entraîneur actuel, Medhy, avec qui elle s’entraîne désormais à Mons. Il lui a permis de continuer à s’entraîner avec son ancien coach tout en venant chez lui les autres jours. Kayla a jonglé entre les deux pendant deux mois, de janvier à mars. Elle a vu ses performances s’améliorer, a adopté une alimentation plus saine, et tout cela en pleine année de terminale ! Travailler avec deux entraîneurs ne pouvait pas durer éternellement, et Kayla a finalement choisi de s’entraîner cinq jours par semaine avec Medhy, dès qu’il a été disponible. Ses jours de repos sont uniquement le mardi et le dimanche. Elle n’a pas d’autre soirée libre. D’ailleurs, c’est un mardi qu’a eu lieu cette interview, pour ne pas perturber son entraînement. On pourrait penser qu’avec un emploi du temps aussi chargé, Kayla suit des études légères, mais pas du tout : elle est en première année de droit et prend chaque aspect de sa vie très au sérieux. Elle participe à des compétitions et à divers championnats tous les week-ends.
Ses participations principales :
Haies : 2 Championnats de Belgique (1 en salle et 1 en plein air) – 12e sur 32 en 2023.
Lancer du poids : 7 Championnats de Belgique – elle se classe généralement 5e sur 16,
avec 2 championnats par an (indoor et outdoor).
En août-septembre 2025, elle a terminé 4e sur 16 toutes catégories confondues (plus de 18
ans).
Lors d’un meeting international à Nivelles en 2024, Kayla a eu la chance de voir et rencontrer de grandes championnes comme Elena Defrère (Allemagne) et Nafissatou Thiam, la grande championne olympique belge.
Quand je demande à Kayla, 18 ans, quelles leçons elle tire de toutes ces années de sport, elle répond qu’elle a appris à s’entraîner, dormir et manger en pensant à son sport et à ses objectifs. Le sport rythme sa vie : elle doit anticiper ses études, ne jamais être en retard, et surtout, ne jamais procrastiner.
avec coach Medhy |
Elle a connu des moments difficiles plus jeune, notamment lorsqu’elle devait choisir entre ses
deux sports préférés. En voulant trop bien faire en haies, elle a commencé à développer une
anorexie. Heureusement, elle a su réagir à temps et sortir de ce mode de vie malsain.
Schaerbeek-meeting des lancers -16ans |
Schaerbeek -championnat francophone d'heptathlon- 16ans |
Championnat francophone lancer du poids - Louvain la Neuve |
Schaerbeek - meeting des lancers - 18ans |
Parfois, elle admet que pratiquer autant de sports et vouloir constamment atteindre le plus haut niveau de son potentiel sportif lui donne parfois l’impression d’avoir manqué son adolescence. Même aujourd’hui, elle ne sort pas le soir et ne se détend pas comme beaucoup de ses camarades. Renoncer à des concerts comme celui de Sexion d’Assaut — une occasion unique pour une adolescente belge — a été un choix qu’elle a dû faire à cause d’une compétition le lendemain. Elle a appris que ce qu’elle considérait comme un sacrifice n’en est pas vraiment un. La joie qu’elle ressent à travers ses efforts constants et sa détermination à donner le meilleur d’elle-même ne peut être ni mesurée ni touchée. Bien sûr, certains jours, elle a une médaille pour témoigner de son travail, mais encore mieux : elle sait qu’à chaque fois qu’elle se consacre pleinement à sa passion, elle se rapproche un peu plus de la connaissance de soi, de la confiance en soi, de la fierté et de l’amour de soi.
Une véritable victoire dans tous les cas !
1ere compétition de sa vie - Forest - 9ans |
l'article a été traduit par Kayla Houari
No comments:
Post a Comment